Jeudi 16 mars 2023

L inclusion du handicap neuromoteur fait debat


Les deputes ont entame mardi au Parlement les consultations particulieres du projet de loi 11, depose plus tot cet hiver par la ministre deleguee a la Sante et aux Aines, Sonia Belanger. Ce projet de loi, qui reprend les grandes orientations du projet de loi 38, mort au feuilleton avant le declenchement de la derniere election, a pour effet d elargir l aide medicale a mourir aux personnes souffrant de maladies graves et incurables, comme l alzheimer, et a celles qui ont un handicap neuromoteur grave et incurable. Ce deuxième point fait debat.

Le College des medecins demande a Quebec de ne pas limiter l acces a l aide medicale a mourir aux seules personnes souffrant d’un handicap neuromoteur.  Le College souhaite que toutes les personnes lourdement handicapees, dans un etat incurable, affligees de souffrances inapaisables et repondant aux criteres etablis, puissent avoir acces a l aide medicale a mourir , a t il affirme. L Association quebecoise pour le droit de mourir dans la dignite est du meme avis.

 Le Code criminel et les balises etablies par la Cour supreme dans l arret Carter en 2015, qui balisent l aide medicale a mourir a travers le Canada, ne qualifient aucunement la notion de handicap. Il existe en effet des handicaps graves de naissance, qui ne sont pas forcement neuromoteurs. Le Collège des medecins demande donc le retrait de ce qualificatif. Il faut que la loi quebecoise accorde en toute equite l acces a ce soin aux Quebecoises et Quebecois, non pas qu elle le restreigne. Sur le plan medical, cette situation est inacceptable , ajoute le Collège.

Quebec garde le cap
En melee de presse, mardi, la ministre Sonia Belanger a reitére qu il est important, pour elle,  de preciser la notion de handicap  dans l elargissement propose de l aide medicale a mourir.

C est pour ca qu on le precise dans handicap neuromoteur. La notion de handicap est une notion qui est extremement large. On peut parler de handicap visuel, handicap auditif, sensoriel, moteur. Vous voyez dans quoi on navigue. Donc, on arrive dans un concept tres complexe, je pense que c est extremement important qu on puisse amener les nuances et baliser, par principe de prudence , a t elle dit.

Celle que l on decrit comme etant la mere de l aide medicale à mourir, l ex deputee pequiste Veronique Hivon, a demand  mardi aux parlementaires de prendre tout le temps necessaire afin d’entendre les citoyens qui souhaitent s exprimer sur l inclusion des handicaps neuromoteurs, ou bien de tous les handicaps, a l elargissement de l acces a ce soin.

L enjeu du handicap doit minimalement faire l objet a travers l exercice actuel de consultations d une attention minutieuse et d une ouverture complete a entendre tous les intervenants qui souhaitent l etre, y compris les opposants, je dirais meme fondamentalement les opposants, pour que le processus de deliberation ait toute la legitimite possible et ne puisse etre remis en cause  , a t elle dit.

Demandes anticipees
La Federation quebecoise des Societes Alzheimer a pour sa part demande mardi que l aide medicale à mourir soit un soin qui fasse partie  de la discussion que le professionnel soignant aura avec son patient au moment du diagnostic d’un trouble neurocognitif majeur, comme l alzheimer, dans un objectif de planification et de preparation aux differentes etapes de vie avec.

 Le professionnel competent devra prendre le temps et surtout choisir le moment adequat pour entamer cette discussion, d autant plus qu un diagnostic amene une multitude d emotions, entre peur, colère, deni, incomprehension, deuils et parfois meme du soulagement  , a t elle indique.

La Federation a egalement ajoute que l aide medicale a mourir  devra toujours etre consideree dans une situation de declin cognitif avance, comme un soin de dernier recours, apres que l equipe soignante ait tout tente pour soulager la souffrance physique et psychique de la personne.

 Cela suppose egalement que l aide medicale a mourir ne devrait en aucun cas devenir la solution de facilite a l incapacite de notre systeme de sante et des services sociaux a prendre soin et a accompagner adequatement les personnes les plus vulnerables de notre societe, jusqu a la fin de vie, a t elle affirme.

Avec Fanny Levesque, La Presse

LE PROJET DE LOI 11, EN BREF
Le gouvernement propose d elargir l aide medicale a mourir aux personnes souffrant de maladies graves et incurables, comme l alzheimer, et aux personnes qui ont un handicap neuromoteur grave et incurable. Il propose aussi de permettre aux citoyens de faire une demande anticipee d aide medicale a mourir.
Le projet de loi ne dresse pas une liste des troubles ou maladies qui seraient desormais admissibles. Il écarte egalement les troubles mentaux de l elargissement prevu pour acceder a ce soin. 
Quebec propose egalement d imposer aux maisons de soins palliatifs d offrir l aide medicale a mourir. Selon l Alliance des maisons de soins palliatifs du Quebec, 25 des 35 maisons de soins palliatifs du Quebec l offrent deja.
Le projet de loi 11 fait aussi tomber le critere de fin de vie imminente parmi les conditions auxquelles une personne doit satisfaire pour obtenir l aide medicale a mourir.

Il permet aussi aux infirmieres praticiennes specialisees de l administrer.